Un matin, il y a quelques
jours, un café, un dessin, j'ouvre un peu facebook, fais défiler ma
time line, like quelques statuts promotionnels de copains artistes et
quelques rares pamphlets pertinents perdus entre les citations des
mignons, les vidéos de chats et les déclarations racistes. Parmi
les fakes et les hoax, une polémique redondante attire mon attention,
chez les nominés au 43ème festival d’Angoulême, il n'y a aucune
femme.
En voilà une surprise
qui n'est pas si étonnante. On connaissait la phallocratie du milieux
de la bande dessinée et notamment du festival international de la
BD d’Angoulême. Depuis 43 ans « Florence Cestac est la
seule femme à avoir reçu cette distinction. Claire Brétecher,
pilier du Neuvième Art, n’a elle-même jamais reçu le Grand Prix,
repartant en 1983 avec le prix du 10ème anniversaire (prix n’ayant
jamais empêché ses lauréats d’être éligibles pour les Grand
Prix suivants). » (FIBD : Femmes Interdites de Bande Dessinée)
http://bdegalite.org/fibd-femmes-interdites-de-bande-dessinee/
Parmi cette liste de nominés, 30 auteurs, zéro auteure. Alors je
vérifie mes sources et cours sur le site officiel d’Angoulême où
sont effectivement énumérés 30 hommes talentueux, dont certains ne
réalisent plus, eux même, de bande dessinée depuis l'époque bénie
où nos daronnes ont brûlées leurs soutifs.
La polémique fait rage sur internet, autrices et auteurs s'indignent
de cet exemple que l'institution donne aux générations bédéistes
futures. BD, milieux sexiste, phallocrate, minée de patriarches
peureux de laisser leurs places à une bande de gonzesses, les bulles
éclatent.
Riad Sattouf, nommé de
la liste, ainsi que d'autres auteurs demandent à ne plus y figurer,
le festival d’Angoulême répond alors dans un communiqué « Que
l'on ne peut pas refaire l'histoire ».
En gros, cela revient à
dire que les femmes, même si on les aime, sont totalement
inexistante du métier et qu'on ne peut pas nominer ce qui n'existe
pas. Que s'il y en a, elles peuvent beaucoup moins se consacrer à
leur carrière car elles sont trop occuper à enfanter et cela se
ressent sur leur talent. Et ce que l'institution de la bande dessinée
doit avant tout reconnaître, c'est le talent !
Si vous pensez que
j'exagère, je vous laisse jeter un œil sur le compte rendu de cette
polémique dans le magazine Le Monde, où figure les choquantes
déclarations du délégué général du festival :
« Il y a
malheureusement peu de femmes dans l’histoire de la bande dessinée.
C’est une réalité. Si vous allez au Louvre, vous trouverez
également assez peu d’artistes féminines. Le Grand prix regarde
vers le passé pour récompenser des auteurs qui ont une œuvre
dense. Jusqu'à présent les femmes étaient peu nombreuses. »
Peu
nombreuse (ce qui est loin d'être la réalité) ne veut pas dire
absente, monsieur Franck Bondoux. Nous pouvons aisément vous
procurer le moteur de recherche google, qui vous donnera une liste
d'auteures de bande dessinée exhaustive et classée par ordre
chronologique. Vous seriez alors surpris de constater que ces femmes
se sont distinguées par leur palmarès depuis de nombreuses années
et que vous ne les avez jamais érigé au rang de votre égal et ça,
c'est la terrible réalité que vous avez dévoilé au monde
entier. La vérité est que cette liste de nommés est mise en place
par trois vieux croutons qui n'ont aucune légitimité face à la
communauté artistique et qui ne rend grâce ni au choix du public ni
au choix des auteurs.
Voilà pourquoi le 7
Janvier, vous avez, après avoir essayé de corriger le tire en
rajoutant six femmes à votre liste de nommés, décidé de supprimer
cette liste et de laisser les auteur(e)s se nommer par eux même pour
élire le gagnant ou la gagnante du grand prix. Un peu nébuleux
comme histoire.
Est-il si paradoxale de
constater que l'institution représentative du 9ème art manque
cruellement d'imagination ? Dans l'histoire de l'image, nous
nous rappellerons qu'en 2016, nous avions rêvé d'un monde égalitaire
où la parité émergeait parmi les grands pontifes de la planche
qui n'ont pas su démissionner de leurs postes alors que leurs
incompétences crevaient les yeux.
Regarder vers le passé,
oui, mais n'oublions pas de vivre dans notre temps pour construire
notre futur.
NLF, artiste auteure.
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